Le gouvernement Benkirane vole au secours du chef du contre-espionnage marocain. La plainte déposée par une ONG française contre Abdellatif Hammouchi, pour torture, prend une nouvelle tournure. La réponse des autorités marocaines ne s’est pas fait attendre et le moins qu’on puisse dire c’est qu’elles n’ont pas lésiné sur les moyens
Fait rarissime, le numéro deux de la diplomatie marocaine a convoqué, vendredi, l’ambassadeur de France au Maroc. Dans un communiqué relayé par la MAP, le ministère des Affaires étrangères a indiqué que Mme Mbarka Bouaida avait signifié à Charles Fries que «le Maroc rejette, catégoriquement, aussi bien la procédure cavalière et contraire aux usages diplomatiques utilisée et davantage encore les cas judiciaires, sans fondements, évoqués».
Rabat exige des explications urgentes
La ministre déléguée auprès du ministre des Affaires étrangères et de la Coopération ne s’est pas contentée de montrer sa désapprobation. La même source précise en effet que le Maroc «exige, avec insistance, que des explications urgentes et précises soient données à cette démarche inadmissible et que les responsabilités soient identifiées».
La ministre a également tenu à faire savoir à l’ambassadeur français que cette affaire pourrait avoir des répercussions sur les relations franco-marocaines. «Cet incident grave et inédit dans les relations entre les deux pays est de nature à porter atteinte au climat de confiance et de respect mutuel qui a, toujours, existé entre le Maroc et la France», lit-on dans le texte du département de Salaheddine Mezouar.
Le Maroc a des moyens de pressions sur la justice française
Certes la justice en France est totalement indépendante du pouvoir exécutif mais sur certains dossiers elle n’échappe pas, elle non plus, aux aléas de la realpolitik. Le cas Mehdi Ben Barka en est d’ailleurs l’exemple le plus éloquent. Les blocages que rencontre cette affaire attestent de cette exception qui suscite bien des interrogations.
Pour mémoire, en automne 2007 un juge français avait lancé des mandats d’arrêts internationaux contre cinq hauts sécuritaires marocains. Toutefois, ces ordres n’ont quitté les locaux du département français de la Justice vers Interpol que deux ans après leur émission. Mais les mandats seront finalement suspendus par le Parquet de Paris sous prétexte qu’Interpol demandait des précisions.
La plainte déposée en France contre, Abdellatif Hammouchi, le chef de la DGST, les services secrets intérieurs, pourrait bien subir le même sort que les mandats d’arrêts du magistrat Patrick Ramaël. Il y va des intérêts économiques et politiques de Paris au Maroc. La convocation de l’ambassadeur Charles Fries sonne d’ailleurs comme un avertissement à la France.