Des ossements humains ont été découverts à Casablanca. Des travaux dans une caserne militaire mitoyenne à l’ancien aéroport d’Anfa viennent de remettre au devant de la scène un douloureux passé. Très vite, l’hypothèse de restes d’un opposant a pris le dessus sur toutes les autres options. Et pour cause, l’endroit était connu pour avoir abrité le centre de détention «El Kourbis».
Il s’agissait initialement d’un hangar dédié à la réparation des avions, avant qu’il ne soit transformé, au milieu des années soixante, en un haut lieu des violations des droits de l’homme durant les années de plomb. «El Kourbis» était, en effet, le point de chute de centaines de personnes arrêtées dans le sillage de l’échec des deux tentatives de coup d’Etat de l’armée contre le roi Hassan II en 1971 et 1972.
D’anciens détenus politiques, à l’instar du très célèbres militant de gauche Mohamed Bougrine (1935-2010), ont, d'ailleurs, révélé dans leurs mémoires "avoir séjourné" à El Kourbis pendant des mois, avant le début de leurs procès.
Une découverte qui peut en cacher d’autres
Le Forum justice et vérité (FJV) vient d’adresser une lettre au procureur général du roi près la cour d’appel de Casablanca, sollicitant la protection des ossements humains de toute manoeuvre de destruction visant à effacer des preuves historiques. Le FJV demande, également, d’informer l’opinion publique sur l’état d’avancement de l’enquête.
Cette découverte d’ossements humains pourrait en augurer bien d'autres. Il faut se rappeler que des témoignages, comme celui du détenu politique Mohamed Bouderdara, présentés lors des auditions de l’Instance Equité et Réconciliation entre 2004 et 2005, avaient signalé la mort sous la torture de plusieurs anciens opposants à «El Kourbis». En dépit de ses déclarations, l’IER n’avait pas mené d’enquêtes pour retrouver de possibles fosses communes au niveau de ce lieu de détention.
Certaines circonstances avait, également, poussé à cette décision. La découverte des restes de 77 victimes dans une caserne de sapeurs pompiers tuées par les forces de l’ordre lors de la fameuse grève générale du 20 juin 1981, à laquelle avait appelé la CDT de Noubir Amaoui pour protester contre des augmentations des prix de produits de consommation, avait contribué à garder, pour un certain temps, secret le passé du centre de détention d’ «El Kourbis».