«Je suis entré à Melilla par la frontière de Bni Ansar quand j’avais 12 ans, j’ai passé 5 ans dans deux centres de détention pour mineurs, à Baluarte et ensuite à la Milagrosa. J’étais fatigué d’attendre et j’en avais marre des problèmes que j’avais là-bas, ils ne m’ont pas donné les papiers (de résidence), et on avait un surveillant qui nous frappait. Ça fait maintenant quelques mois que je suis ici, je dors dans le port. Avec un peu de chance, je pourrais bientôt me glisser dans un bateau et partir en Espagne», raconte Mohamed*, cité dans un article publié, ce mercredi 20 novembre, par la radio espagnole Cadena Ser, en marge de la Journée internationale des droits de l'enfant.
Mohamed, âgé aujourd’hui de 17 ans, n’est pas le seul dans cette situation. Au total, ils sont une trentaine d’enfants et adolescents marocains à investir jour et nuit les quais de ce port, situé à une dizaine de kilométrés seulement de Nador, dans le nord-est du Maroc.
Mauvais traitements
La plupart d’entre eux se sont enfuis des centres d’accueil pour mineurs où ils étaient placés, ne concevant pas pourquoi ceux-ci tardaient autant à leur livrer des papiers de résidence. D’autres sont plutôt sortis à cause des mauvais traitements qu’ils subissaient des fois de la part du personnel chargé des les surveiller, rapporte la même source.
«Ici, on passe notre journée à planifier dans quel camion on va se cacher. Parfois, on fait des tests dans les camions de ferraille, on cherche des trous au milieu de la benne du camion et on essaie de ne pas se faire repérer par la Guardia civil. Moi, je me fais toujours coincer et expulsé, des fois avec des chiens qui font très peur et d’autres, avec une baffe et un coup de bâton pour nous faire sortir du port», confie Salem*, 16 ans, qui vit à Melilla également depuis l’âgé de 12 ans, dans l’espoir de parvenir un jour à atteindre la péninsule ibérique et «améliorer la vie de sa famille».
«Nous sommes des gens de la campagne pauvres. J’aimerais améliorer la vie de ma mère et de mes frères. J’étais avec eux pendant le ramadan, mais on se disputait souvent parce que j’étais pour eux une bouche de plus à nourrir alors que je ne ramenais rien à la maison», regrette-t-il.
Comme Mohamed Marhoum
Selon l’association Prodein, basée à Melilia, qui œuvre pour la protection de l’enfance, chaque semaine, «quatre à cinq enfants» réussissent à se glisser au dessous d’un camion sans se faire repérer par la police espagnole. «Ce qui pousse les autres enfants à ne pas abandonner la partie», souligne son président Jose Palazón.
«Je veux être comme Mohamed Marhoum», confie un autre adolescent marocain, cette fois, de l’autre coté du détroit, à un correspondant d’El Pais. Après plusieurs tentatives échouées, cet enfant a réussi il y a quelques mois à entrer en Espagne, rapporte le journal espagnol. Aujourd’hui, son souhait est d’avoir le même parcours que cet athlète marocain de 22 ans, ayant traversé clandestinement la frontière de Sebta en 1999, avant de se faire repérer par les Espagnols pour son talent sportif.
Aujourd'hui Espagnol, Mohamed Marhoum représentera le voisin ibérique, le 8 décembre prochain, au Championnat d’Europe de cross-country devant se tenir à Belgrade, en Serbie.
*Prénoms changés.