«On ne connaît que les choses qu'on apprivoise.» Cette citation du Petit Prince, d'Antoine de Saint-Exupéry, sied parfaitement à Eliesse Ben Seghir. Pour devenir le petit prince de Monaco, le jeune footballeur a dû apprivoiser le ballon rond. Tout petit, il rêvait déjà de buts, de pelouse, de gradins, de ola dans les stades, et de trophées soulevés, les mêmes que ses stars du foot qu'il admirait.
Le Franco-Marocain, né en 2005, fait ses débuts au SC Cogolinois (2010-2016), avant de partir au club de Fréjus St-Raphaël (2016-2018). Il est ensuite détecté par l'AS Aix-en-Provence (2018-2020). Et c'est à 15 ans que le choix lui est donné d'intégrer un club de Ligue 1 : Olympique de Marseille ou AS Monaco.
La suite de l'histoire, vous la connaissez. C’est au sein de l’AS Monaco qu’Eliesse Ben Seghir prend son envol. «Mon entame de carrière, je la juge plutôt bonne, même si les blessures m’ont freiné», confie-t-il dans une longue interview pour Onze Mondial. Malgré ces pépins physiques, il s’est imposé comme une pépite du championnat français, captivant les supporters par son jeu libéré et sa capacité à faire la différence.
«Je suis uniquement focalisé sur mon jeu. Mon objectif est simple : être performant, marquer, faire des passes décisives et donner du plaisir aux gens. Le reste viendra tout seul.»
Avec une philosophie axée sur le travail et le plaisir, il refuse de se laisser distraire par les étiquettes, qu’il s’agisse de celles de «prodige» ou de «grand espoir». Sa maturité tranche avec son jeune âge, tout comme son ambition assumée : briller et aider son équipe à décrocher des titres.
Comme beaucoup de joueurs de sa génération, Eliesse Ben Seghir s’inspire des géants du football mondial. «Neymar est mon exemple, j’aime sa liberté et son style de jeu. Tous les jeunes se retrouvent en lui. Il y a aussi Messi, dont la capacité à éliminer toute une équipe est incroyable.»
La famille Ben Seghir / Ph. Getty ImagesLa famille Ben Seghir / Ph. Getty Images
L'esprit de famille
Mais au-delà des stars planétaires, il cite également son grand frère, Salim, passé par Nice, Marseille et qui joue aujourd'hui en Suisse, comme première source d’inspiration. «C’est lui qui m’a donné envie de jouer au foot. Je le suivais partout, même à ses détections. C’est ce qui m’a motivé à réaliser mon rêve», reconnaît-il auprès du magazine sportif.
La famille est un socle essentiel pour Eliesse. En plus de son frère Salim, un autre membre de la famille a joué un rôle central dans sa carrière de footballeur. Son père, originaire de Tinghir, lui transmet la passion du football en lui offrant, à ses quatre ans, son premier maillot de football, celui de Manchester United FC. Toujours présent pour l'accompagnement de ses deux fils aux matchs, un drame survenu en pleine pandémie de Covid-19 va faire vaciller la vie d'Eliesse : la perte de son père.
Il décrit cette période comme l’une des plus difficiles de sa vie, un moment où il a dû puiser dans ses ressources intérieures pour continuer à avancer. «Mon père a toujours été une source de motivation, et perdre cette figure de soutien a été un choc immense», confie-t-il dans une interview à Telefoot. Malgré la perte d'un pilier, le sol vacille mais ne se dérobe pas pour Eliesse. Après une mise au vert chez des amis en Tunisie, il revient plus fort mentalement et physiquement, et va se dépasser sur le terrain pour honorer la mémoire de son père.
Eliesse Ben Seghir face à un autre joueur d’origine marocaine, Lamine Yamal / DREliesse Ben Seghir face à un autre joueur d’origine marocaine, Lamine Yamal / DR
La magie de la Ligue des champions
L’année 2024 marquera un tournant pour Ben Seghir avec sa découverte de la Ligue des champions, un rêve devenu réalité. «Entendre la musique de la Ligue des champions, c’est incroyable. C’est le summum du football européen.»
Parmi ses souvenirs mémorables, il cite une victoire éclatante face au FC Barcelone. «Après le match, tout le monde me parlait de ma célébration avec des dabs devant le Camp Nou. C’était un moment magique.»
Alors qu’il aurait pu poursuivre une carrière internationale avec la France, Eliesse Ben Seghir a rapidement choisi de représenter le Maroc, une décision qu’il assume pleinement. «Beaucoup disent que j’ai choisi trop tôt, mais pour moi, il n’y a pas de timing parfait. Je voulais jouer pour le Maroc, donc pourquoi attendre ?»
Le Maroc dans le sang
Le jeune prodige salue également les progrès réalisés par le football marocain. «Ce que le Maroc a fait pour structurer le football est incroyable : les nouveaux centres d’entraînement, l’encadrement… C’est un projet qui porte ses fruits.» Inspiré par le parcours historique des Lions de l’Atlas lors du Mondial 2022, il espère à son tour écrire une page de cette belle histoire.
Marqué par une éducation marocaine transmise par ses parents, malgré des voyages peu fréquents au pays durant son enfance, il revendique fièrement ses racines. En sélection, son engagement est déjà salué : huit apparitions, trois buts et deux passes décisives depuis mars 2024.
Entre ambition, humilité et travail acharné, Eliesse Ben Seghir est bien décidé à écrire son propre chapitre dans le livre du football mondial. «Mon objectif est de rester performant et d’aider mon équipe. Le reste viendra tout seul.» Un état d’esprit qui pourrait bien le conduire au sommet. Avec le Mountakhab, une CAN en 2025 et un Mondial en 2030 l'attendent au Maroc.