Fahd Laamoumi est un entrepreneur en série, avec une formation solide en ingénierie aérospatiale et plus de 12 ans d’expérience dans les technologies et le conseil. Il a commencé sa carrière à la NASA, en Californie (Etats-Unis) avant de devenir consultant pour McKinsey & Company et s’engager ensuite dans l’entrepreneuriat.
Fahd Laamoumi dirige actuellement deux sociétés : Ballistic Defense System à Rabat et HRDB, un cabinet de conseil basé au Luxembourg. En tant que PDG de la structure basée au Maroc, il pilote le développement de drones autonomes de pointe. La dernière création en la matière est en passe de révolutionner l’industrie de la défense.
Pouvez-vous nous parler de votre parcours académique et de ce qui vous a conduit à votre poste actuel chez Ballistic Defense System ?
Depuis mon enfance, je me suis passionné pour l’armement et l’aéronautique. A 8 ans, je connaissais déjà les spécificités techniques de tous les avions de chasse de la Seconde Guerre mondiale. Parmi tant d’autres, deux de mes héros d’enfance étaient Wernher von Braun et Sergei Korolev. Cette passion m’a conduit à poursuivre des études d’ingénieur à Polytechnique Mons (Belgique) et à SUPAERO à Toulouse (France), puis à fonder Ballistic Defense System.
Votre entreprise est spécialisée dans les drones autonomes destinés à la défense. Pourriez-vous nous faire part de votre vision de la manière dont ces innovations renforceraient la sécurité du Maroc dans les années à venir ?
Nous vivons une époque de grands changements, comparable à la révolution de la poudre à canon. L’intelligence artificielle permet et permettra aux robots de mener à bien des missions militaires de plus en plus complexes et de manière entièrement autonome. Les pays dotés des meilleurs robots évolutifs auront l’avantage. Nous souhaitons contribuer à la sécurité de notre pays.
Compte tenu de la complexité des systèmes autonomes, quels sont les principaux défis auxquels vous êtes confrontés dans le développement de solutions de défense basées sur l’IA, et comment répondez-vous aux défis de sécurité ?
90% des efforts de R&D sont consacrés au développement de logiciels embarqués. Construire un drone télécommandé est très simple. En Europe, même les enfants en construisent dans les clubs d’aéromodélisme. Le défi est de le rendre intelligent, autonome, précis et efficace.
Notre principal défi est de recruter des ingénieurs R&D expérimentés. Malheureusement, après avoir mené des dizaines d'entretiens, il s’est avéré très difficile de trouver des candidats ayant une expérience en : Modélisation en vision par ordinateur et R&D en contrôle de vol ou en robotique.
J’aimerais profiter de cette tribune pour inviter les Marocains ayant une solide expérience dans ces domaines à se connecter avec moi sur LinkedIn. La meilleure façon de nous impressionner est de présenter des exemples concrets de code que vous avez développé et des problèmes que vous avez résolus. Notre principal critère de recrutement est la compétence, avant les CV et les diplômes.
Lors du Marrakech Air Show, vous avez présenté un drone télécommandé. Pouvez-vous nous en dire plus sur ce récent projet ?
Depuis plus d’un an, nous développons exclusivement sur fonds personnels l’intelligence embarquée d’un drone, lui permettant d’identifier, de détecter et d’entrer en collision avec une cible de manière autonome. Nous travaillons désormais sur la navigation sans GPS.
Vous dirigez deux sociétés en même temps. Pourriez-vous nous décrire les activités de HRDB ?
HRDB met en relation les ingénieurs marocains avec les entreprises européennes qui en ont besoin sur le marché européen. Aujourd’hui, malgré le ralentissement économique, il existe une forte demande en Europe pour les ingénieurs informatiques marocains, qui ont une excellente réputation sur le marché, notamment dans les régions francophones, d’autant qu’ils parlent couramment le français.
Vous avez occupé différents postes dans le conseil et l’ingénierie. Comment ces expériences diverses ont influencé votre approche en tant que dirigeant dans un secteur à enjeux élevés comme la défense ?
J’ai beaucoup voyagé et suivi un parcours professionnel non linéaire, acquérant de nouvelles compétences à chaque étape. Cette expérience me profite grandement aujourd’hui en tant que PDG. Mon expertise technique, combinée à mon sens des affaires, est inestimable pour diriger une entreprise de haute technologie.
A la NASA Ames Research Center, vous avez travaillé sur des modèles orbitaux et atmosphériques. Y a-t-il des parallèles entre l’ingénierie aérospatiale et les défis techniques auxquels vous êtes confrontés aujourd’hui dans les systèmes de défense autonomes ?
Bien entendu. Faire de l’ingénierie R&D implique, entre autres, de modéliser des systèmes complexes. L’approche scientifique est similaire.
Pour avoir travaillé dans différents secteurs, de l’aéronautique à la défense en passant par le conseil, que gardez-vous comme moment le plus marquant de votre carrière et pourquoi ?
En 2015, j’ai été licencié par Schlumberger lors d’une restructuration majeure de l’entreprise, suite à l’effondrement des prix du pétrole. A 29 ans, je touchais un excellent salaire et c’était donc une épreuve difficile. Mais cela m’a poussé à sortir de ma zone de confort, ce qui m’a conduit de manière inattendue vers l’entrepreneuriat. Cela s’est avéré être la meilleure chose qui pouvait m’arriver.
A l’avenir, quel sera selon vous le rôle du Maroc dans le paysage mondial des technologies et de la défense, et comment envisagez-vous d’y contribuer ?
Le Maroc possède deux atouts incroyables :
1. Un potentiel humain extraordinaire, qui pourrait nous aider à créer des chefs-d’œuvre technologiques. Il suffit de l’exploiter au profit de l’innovation.
2. L’une des meilleures diplomaties du monde, grâce à la vision royale. Nous comptons de nombreux pays amis à travers le monde. C’est un potentiel considérable d’exportation d’armes.