Après des semaines de silence, l’Algérie a fini par donner sa version officielle à la normalisation de ses relations avec l’Espagne, opérée en catimini, en nominant un nouvel ambassadeur à Madrid ; après une «rupture» de 17 mois. «Il y a un changement dans la position de l'Espagne sur la question du Sahara occidental», a expliqué le ministre algérien des Affaires étrangères, Ahmed Attaf, dans une interview accordée à la plateforme Atheer d’Al Jazeera.
«Le discours du chef du gouvernement espagnol à l’Assemblée générale de l’ONU nous a donné le feu vert pour réviser notre relation avec l’Espagne», a-t-il précisé. «L’Espagne s’est ainsi aligné de nouveau sur la position européenne. C’est ce que nous avons toujours réclamé», a estimé le chef de la diplomatie algérienne. Pour mémoire, l’Allemagne, la Belgique, les Pays-Bas, la France, le Portugal et d’autres pays de l’Europe centrale ont apporté leur appui à l’initiative marocaine d’autonomie.
Ahmed Attaf s’est dit convaincu qu’«il y a eu réellement un changement» de la part du gouvernement espagnol sur un dossier «d’une importance capitale pour nous. Il ne faut pas oublier que l’Espagne est l’Etat qui a colonisé la Sahara occidental et assume en conséquence des responsabilités particulières envers le Sahara occidental», a-t-il affirmé. Et de rappeler que son pays «n’a pas accepté» que Pedro Sanchez apporte son soutien au plan marocain d’autonomie au Sahara occidental.
Attaf n’a fait que reprendre la version donnée par les médias en septembre
La version donnée par le ministre des Affaires étrangères est sortie du même moule que la campagne médiatique qui a suivi l’intervention de Pedro Sanchez devant l’Assemblée générale de l’ONU, le 22 septembre. «Il abandonne son appui au "Plan d'autonomie" marocain. Sanchez lâche le Makhzen. Une véritable gifle à la face du régime marocain», s’était alors félicité le quotidien L’Expression. «Sahara occidental : Pedro Sanchez se retourne contre le Makhzen», avait annoncé pour sa part un autre média algérien. Pour rappel, en septembre 2022, le président Abdelmadjid Tebboune avait lâché que «l’Espagne commence à revenir à la décision européenne sur la question du Sahara occidental». Depuis, sa prophétie ne s’est pas encore réalisée.
Quelques semaines après cette euphorie, Pedro Sanchez avait écarté, au grand dam du Polisario et de l'Algérie, toute révision de son soutien à l’initiative marocaine d’autonomie au Sahara occidental dans les pactes de gouvernement conclus avec Sumar et les formations indépendantistes catalanes et basques.
Une mise à l’écart suivie par les déclarations de José Manuel Albares, le 14 décembre à Rabat. «La position de l’Espagne concernant la question du Sahara n’a pas changé. Elle est celle déjà exprimée dans la Déclaration conjointe, adoptée le 7 avril 2022, et la Déclaration sanctionnant la 12ème session de la Réunion de Haut Niveau (RHN) Maroc-Espagne en février 2023», a précisé le chef de la diplomatie. En effet, la Déclaration conjointe publiée au terme des entretiens entre le roi Mohammed VI et Pedro Sanchez, dispose que «l’Espagne considère l’initiative marocaine d’autonomie, présentée en 2007, comme la base la plus sérieuse, réaliste et crédible pour la résolution de ce différend».
L’Algérie avait parié sur l’arrivée d’un gouvernement dirigé par le Parti Populaire pour rétablir ses relations avec l’Espagne, d’autant que le chef de cette formation avait condamné, publiquement et à plusieurs occasions, le soutien de Pedro Sanchez au plan marocain d’autonomie au Sahara.