Le Polisario a tiré, à deux reprises, des missiles sur Es-Smara. Sommes-nous face à une escalade dans le conflit ou une opération de communication destinée aux camps de Tindouf ?
Le Polisario est dans une impasse. La situation dans les camps de Tindouf est catastrophique. Le Polisario, en tant qu’organisation, est secoué par des divisions et de nombreux conflits dont certains émergent alors que d’autres ne le sont pas encore.
Je pense que militairement, ces attaques sur Es-Smara sont insignifiantes parce qu’elles ciblent des citoyens civils. Elles sont surtout un message de la part du Polisario destiné à l’opinion dans les camps de Tindouf sur son existence et sa capacité à affronter le Maroc. Ces tirs ont pour objectif d’éloigner l’opinion locale des divisions qui fracturent le sommet du mouvement, même si le moment choisi n’est guère propice à ce genre d’opérations, notamment avec les massacres en Palestine. Je pense que les Sahraouis dans les camps de Tindouf opèrent des comparaisons entre tuer des civils ici et là-bas. S’en prendre aux civils conduira à classer le Polisario sur la liste des organisations terroristes.
A votre avis, pourquoi le Polisario a choisi ce moment pour lancer des attaques sur Es-Smara ?
Depuis sa défaite au passage frontalier d’El Guerguerate (le 13 novembre 2020), le Polisario est dans une impasse. Il va perdre d’autres régions. Les zones tampons lui sont désormais inaccessibles à cause des drones du Maroc. Le Front n’a devant lui que le suicide politique, puisque tuer des civils innocents va conduire la communauté internationale à classer le Polisario sur la liste des organisations terroristes. Ils ont choisi le mauvais moment pour riposter à la résolution 3702 du Conseil de sécurité de l’ONU (adoptée le 30 octobre). Ce n’est pas dans leur intérêt d’user d’actes violents contre des innocents pour imposer des négociations.
Au lendemain des premiers tirs sur Es-Smara, du 28 octobre, une délégation militaire des Forces armées royales s’est rendue en Mauritanie. Y a-t-il un lien entre les deux événements ?
Il y a des accords militaires entre les deux pays. La Mauritanie est, désormais, capable de sécuriser ses frontières. Parfois, et à la faveur de ses bonnes relations avec des citoyens mauritaniens, le Polisario a franchi ces frontières pour lancer des opérations contre le Maroc. Des attaques qui ne bénéficiaient pas du soutien de l’Etat mauritanien. Face à la menace terroriste en provenant du Sahel, l’Etat mauritanien a déployé des efforts pour sécuriser ses frontières. La défense des frontières est un acte légitime aussi bien de la part du Maroc que de la Mauritanie.
A votre avis, l’Algérie a-t-elle donné son feu vert au Polisario pour lancer des missiles sur Es-Smara ?
L’Algérie est la principale partie dans ce conflit. L’Algérie instrumentalise le Polisario pour servir exclusivement ses propres intérêts. Il faut rappeler que l’Algérie, depuis la reconnaissance par les Etats-Unis de la marocanité du Sahara en décembre 2020, a réagi aux conséquences de ce nouveau contexte en rappelant son ambassadeur en Espagne pour consultations (en mars 2022). Après 16 mois de «rupture», Alger a nommé un nouvel ambassadeur sans rien gagner. C’est une défaite cuisante pour le pouvoir militaire.
Par ces attaques, l’Algérie veut attirer l’attention en tentant de déstabiliser le Royaume, alors que le Maroc d’aujourd’hui a franchi des pas dans le développement, la paix et la sécurité. Le Polisario ne peut rien entreprendre sans l’appui de l’Algérie. Ce sont, en effet, les généraux algériens qui dirigent le Polisario.
L’Algérie veut affaiblir le Maroc et imposer sa présence dans des régions qui ne sont pas algériennes. Le Sahara occidental et le Sahara oriental ne sont pas des territoires algériens, au même titre que des territoires maliens, tunisiens et libyens. Tous ces territoires ont été annexés par la France qui croyait rester éternellement en Algérie. Affaiblir le Maroc pour qu’il ne revendique pas le Sahara oriental est la stratégie des militaires à Alger, et ce depuis l’indépendance du pays en 1962. Elle n’a pas changé.