Dans le cadre de son projet musical Aïta Mon Amour, l’artiste Widad Mjama, en collaboration avec Khalil Epi, sort son premier single intitulé Sidi H’med, avec le label Shouka. Disponible sur les plateformes de streaming à partir du 28 octobre 2023, il s’agit d’un vibrant hommage aux chikhates, chanteuses populaires dépositaires d’une tradition artistique multi-centenaire au Maroc.
Inspirée par ce chant ancestral qui lui tient tant à cœur, Widad Mjama a en effet créé Aïta Mon Amour pour faire résonner cet art populaire à l’ère contemporaine, à la croisée de l’héritage et de l’innovation, de la poésie orale et de la diffusion que lui permettent désormais les outils numériques. Ainsi, le projet est né d’une «fascination profonde pour les chikhates, ces femmes qui ont porté l’Aïta, une tradition datant du XIIe siècle, à travers les âges», indique un communiqué parvenu à Yabiladi.
Annonçant précédemment la naissance de Aïta Mon Amour dans un entretien à notre rédaction, Widad Mjama a confié que cette musique populaire faisait partie intégrante de son vécu, à Casablanca. «Je suis d’une famille d’agriculteurs de Casablanca, du côté de mon père, et de Khémisset, du côté de ma mère. J’ai donc baigné dans la tradition musicale rurale et je suis contente de me pencher sur ce répertoire artistique, porté par des femmes, qui ont été jugées parce qu’artistes, rejetées socialement et familialement», nous a-t-elle déclaré.
Avec ce projet, la chanteuse, accompagnée de Khalil Epi, aspire à «arracher cette poésie à l’oubli» en tissant «un récit musical émouvant, traversant les frontières entre tradition et modernité, entre héritage et expression personnelle». Dans ce sens, Sidi H’med est un «hommage poignant au blues rural marocain, empreint d’attente et de nostalgie». «Cette Aïta, ce cri du cœur d’une époque révolue, est ravivée par les questions-réponses qui en font l’excellence même de l’Aïta Abdia», indique l’annonce du single.
Celle-ci rappelle qu’Aïta Mon Amour se veut «un pont invisible entre le passé et le présent», comme «un passage de flambeau entre deux générations». Dans ce sens, Widad choisit la scène comme «terrain pour faire changer les mentalités dans le milieu très masculin qu’est la musique», tout en mettant en avant un art «exclusivement oral, qui n’a jamais connu de mise en écriture, mutant avec le temps en raison des omissions qui atteignent la transmission».
Première femme rappeuse au Maroc, lauréate du Conservatoire de Casablanca en danse classique et art dramatique, Widad Mjama a fait ses débuts sur la scène nationale underground, aux côtés de figures de la culture hip-hop de la fin des années 1990 et le début des années 2000. Avec Walid Ben Selim, elle co-fonde N3rdistan, choisissant Widad Brocos comme nom de scène.