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Grand Angle

Maroc : « L’inefficacité » de la justice pénale pointée du doigt

Le département des affaires pénales et de la grâce au sein du département de Ramid a réalisé un «diagnostic de la justice pénale» au Maroc. Sombre tableau.

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Après Rabat, Casablanca, Oujda et Fès abrite en ce moment [9 et 10 novembre] la conférence régionale du dialogue national sur la réforme de la justice avec pour thème : «la modernisation de la justice pénale», rapporte l'Economiste. L’évènement a été introduit par un rapport présentant «le diagnostic de la justice pénale» au Maroc.

Résultat : la justice pénale au Maroc est «inefficace, lente, superficielle et expéditive», affirme Taieb Cherkaoui, directeur des affaires pénales et de la grâce au ministère de tutelle. Et d’ajouter que «les tribunaux marocains croulent sous l’encombrement et l’entassement». En effet, bien que certaines affaires soient jugées «en une semaine», d’autres attendent des années avant tout dénouement. Cité en exemple, le tribunal de première instance de Nador dispose encore de dossiers des années 90 pas encore traités.

Les choses ne s'améliorent pas au fil du temps et les chiffres parlent d'eux mêmes. En 2011, sur 2,3 millions d'affaires pénales sur l'ensemble du territoire, seules 955 000 ont pu être traitées, soit 96% des actions nouvellement intentées et 71% de l'encours. Les causes évoquées de cette lourdeur sont nombreuses, notamment, le manque de moyens financiers du ministère, le retard dans l’élaboration des expertises et l’absence d’un système de notification efficace.

Trop d’incarcérations et de procès

Les statistiques révèlent qu’en 2011, 84 700 cas de détention provisoire ont été enregistrés, ainsi que 156 000 gardes à vue. De plus, le soulèvement de la jeunesse marocaine, avec notamment l’émergence du Mouvement du 20 février, a entrainé l’augmentation des incarcérations. Sans parler des cas de condamnation avérés inutiles, comme celle du boxeur Zakaria Moumni. Au lieu d’incarcérer à ce rythme, Taieb Cherkaoui propose «de faire usage d’amendes administratives, de trouver des alternatives à la justice, telles la médiation et de mettre en musique les politiques de développement socioéconomiques et la politique pénale».

En 10 ans, les affaires répressives ont atteint un peu plus de 14 millions de procès avec une moyenne de près de 1,5 million par an, soit 55% de l’ensemble des affaires jugées devant les tribunaux du royaume chérifien.

En outre, le nombre des audiences répressives dépasse les 61 000 par an, pour une moyenne hebdomadaire de 1200 séances. Et les principales villes concernées par ce type d’affaires sont Casablanca [6240 procès], Rabat et Agadir [5000 procès chacune]. De plus une grande partie du corps magistral est principalement dédiée à ce type de dossier. Ce serait au total 1 200 juges mobilisés pour gérer ces dossiers, soit 40% de l’ensemble des magistrats, sans compter les 550 membres du ministère qui y sont affiliés. 

Après avoir mené son étude, M. Cherkaoui estime qu’une «prolifération de textes répressifs fait perdre au droit pénal sa finalité ultime». La réforme est donc la bienvenue. L’objectif des conférences régionales organisées un peu partout dans le pays devrait aboutir à une justice plus équitable. Prochainement, la tutelle mettra le cap sur Marrakech, Agadir, Dakhla et Tanger.

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