En mars 2020, Yabiladi avait révélé un vaste système de corruption de la justice au niveau du tribunal de première instance de Casablanca. Des milliers de dossiers de recouvrement étaient jugés dès la première audience, à l’insu des citoyens et de leur défense. L’enquête avait pointé plusieurs noms de juges, avocats, huissiers de justice, clercs et entreprises plaignantes créancières. En décembre 2021, des enquêteurs de l’Inspection générale du pouvoir judiciaire du Conseil supérieur du pouvoir judiciaire (CSPJ) s’étaient alors rendus au tribunal civil de Casablanca pour enquêter sur les nombreux dysfonctionnements.
Des sources du journal Assabah de ce mardi ont confirmé que l’Inspection générale a transmis les résultats au Président-délégué du Conseil supérieur du pouvoir judiciaire, Mohamed Abdennabaoui. Des résultats qui «ont été discutés», donnant lieu à la décision d’une «procédure disciplinaire contre quatre juges du même tribunal» qui pourront «probablement comparaître au cours de cette semaine devant le conseil», poursuit la même source.
Selon nos sources, les quatre font partie d’un groupe de dix juges ayant statué sur les dossiers de recouvrement via le système concerné. Trois d’entre eux ont rendu près de 80% des jugements dans le cadre des affaires concernées, selon les données compilées par Yabiladi depuis Mahakim.ma pour l’année 2019.
Une enquête en cours pour les avocats et les huissiers
En ce qui concerne le dossier des verdicts suspects prononcés par ledit tribunal, les enquêtes menées par la Brigade nationale de la police judiciaire (BNPJ), ordonnées par le procureur général du près la Cour d’appel de Casablanca, sont toujours en cours. La BNPJ avait commencé à entendre certains avocats, soupçonnés d’implication dans la falsification de convocations devant être adressées aux clients. «Ce sont des avocats qui jouissent de la confiance des compagnies d'assurance et de prêt dans ce genre d’affaires», rappelle-t-on.
Ce système de corruption bien huilée était en vigueur sous l'ère de l'ancien président du tribunal de première instance de Casablanca. Il permettait de gonfler les statistiques d'efficacité et de productivité relayées avec satisfecit par le ministère de la Justice. Les révélations de Yabiladi indiquaient que ce système était actif depuis au moins 2017.
Au tribunal de la Casablanca, ces verdicts étaient rendus en un temps record, au profit de grandes entreprises et en l’absence des personnes poursuivies ; les convocations étant envoyées sciemment à des adresses incorrectes. De plus, le tribunal de première instance était saisi bien qu’il ne soit compétent que pour les créances inférieures à 20 000 dirhams dans ces litiges commerciaux et très souvent pour des affaires où les clients ne résidaient pas dans la région du grand Casablanca et qui devaient donc être jugées ailleurs.