En octobre 2021, lors de son premier oral au Parlement, le chef du gouvernement Aziz Akhannouch a présenté devant les députés et les conseillers, dix engagements de son cabinet pour le quinquennat. Il avait ainsi promis de renforcer le contrôle de la bonne gouvernance dans les secteurs de la Santé et l’Education nationale, érigés en «choix stratégiques» et d’opérer une hausse du budget consacré au ministère de la Santé et à améliorer la qualité des services sanitaires sur l’ensemble du territoire national.
Dans sa déclaration gouvernementale, Aziz Akhannouch avait aussi annoncé la création, à l’horizon 2026, d’«un million de postes d’emploi» et de réserver, d’ici 2026, 30% des emplois à créer aux femmes. Il avait également promis, entre autres, le lancement, en 2022, de chantiers de travaux pour les «grands et petits, dans le cadre de contrats provisoires, sans condition de qualifications (pour les concernés), au niveau des collectivités territoriales, et avec le partenariat d'associations de la société civile et des coopératives locales».
Protection sociale, investissements et programmes d’emplois
Alors que le gouvernement Akhannouch souffle, dans quelques jours, sa première bougie, l’Observatoire du travail gouvernemental (OTRAGO), dépendant du Centre Al Hayat pour le développement de la société civile, a publié un rapport qui établit un premier bilan du gouvernement. Il énumère 12 points positifs que le gouvernement a pu réaliser entre octobre 2021 et octobre 2022.
Ainsi, le rapport affirme que le gouvernement a continué de réaliser ses engagements quant à la mise en œuvre de l’arsenal juridique lié au chantier de la généralisation de la protection sociale et pour le dialogue social, notamment en l’institutionnalisant et en signant un accord avec les syndicats les plus représentatifs et la CGEM. L’exécutif a aussi réussi à apurer la dette de TVA accumulée pour les entreprises du secteur privé. Le gouvernement a aussi veillé à maintenir stables les prix de certains produits, comme le blé, le sucre et le gaz, en augmentant le budget de la Caisse de compensation, qui a atteint 32 milliards de dirhams.
Le document rappelle le «résultat positif» de la Commission des investissements qui s’est réunis 6 fois pour approuver 58 projets pour un total de 39,1 milliards de dirhams afin de créer 16 800 emplois directs et indirects. Aussi, pour maintenir stable les prix du transport, l’exécutif a accordé des aides directes aux professionnels. De plus, le gouvernement Akhannouch a également soutenu le secteur du tourisme, frappé de plein fouet par la pandémie du Covid-19 en accordant une aide de 2 MMDH.
L’exécutif a également lancé les programmes Forsa et Awrach, soutenu le secteur agricole face à la sécheresse (10 MMDH) et les feux de forêts, dévoilé la nouvelle Charte de l’investissement et a adopté un décret en rapport avec le Registre national de la population.
Une passivité face aux prix des carburants et la corruption
En revanche, le rapport recense 19 points négatifs dans le bilan du gouvernement un an après sa création. L’Observatoire y pointe «l’absence de mesures parallèles pour garantir le succès et la pérennité des chantiers de la Protection sociale, notamment ceux liés à la remise en cause du tarif national de référence et des sources de financement», la «confusion et hésitation sur les résultats escomptés du lancement du programme Awrach et les disparités entre régions» ainsi que «l'échec du programme Forsa, notamment quantitatif ou qualitatif, depuis son lancement».
Le document fustige la «passivité du gouvernement» et l’absence d’intervention pour atténuer la hausse des prix des carburants sur les citoyens et ses répercussions économiques et sociales. Des interventions en lien avec «le plafonnement des marges, les enquêtes sur les conditions juridiques du stockage et la révision des taxes» sur ces produits. L’observatoire reproche au gouvernement de ne pas intervenir pour résoudre la problématique de concurrence au sein de ce secteur, sans oublier l’«opacité» face à la résolution de la problématique de la Société anonyme marocaine de l'industrie du raffinage (SAMIR).
L’observatoire reproche aussi au gouvernement Akhannouch l’absence de «toute vision pour renforcer et développer le système démocratique et les droits humains», pointant «l’absence de volonté politique chez lui pour entamer des réformes structurants en lien avec les dossiers de la corruption, la concurrence, la réforme des caisses de compensation et de retraites et d’autres dossiers stratégiques». Il critique aussi l’exécutif s’agissant du dossier du stress hydrique, la rareté de l’eau et la gestion des ressources hydriques. «Le gouvernement continue dans son programme Génération Green et ses orientations agricoles consommatrice d’eau, sans réformer cette stratégie ou modifier ses axes», indique-t-on encore.
Faiblesse de communication et «monopole» sur l'initiative législative
Celui-ci déplore aussi «la faiblesse de la communication gouvernementale» et la «grande confusion» dans la présentation des faits et les réactions en lien avec les grands événements et dossiers ou encore dans l’explication des mesures et actions prises par l’exécutif, n'oubliant pas de reprocher à Aziz Akhannouch le manque de communication avec l’opinion publique. Le document dénonce, dans le même sillage, le fait que «le caractère gestionnaire domine le travail des différents départements ministériels» alors que «toute mesure ou initiative de réforme démontrant la promesse du gouvernement d’instaurer des réformes structurelles reste absente».
Il pointe l’incapacité du gouvernement à remplir son engagement concernant le soutien financier des personnes âgées de plus de 65 ans pourtant inscrit dans la Loi de finances 2022 ainsi que son «incapacité à lutter contre les intermédiaires, les spéculateurs et ceux qui manipulent les marchés et alimentent les vagues d’inflation et la flambée des prix».
S’il rappelle que les rangs du gouvernement n’ont toujours pas été remplis par les secrétaires d’Etat, conformément au communiqué du Cabinet royal annonçant sa formation, l’observatoire évoque «la mauvaise coordination entre les composantes du gouvernement» et la hausse des nominations dans les hautes fonctions».
Sur le plan législatif, le rapport critique le «monopole» de la majorité gouvernemental sur l’initiative législative, la marginalisation du rôle de l’opposition et leurs impacts négatifs sur l’équilibre politique du pays, outre le refus du chef du gouvernement de s’ouvrir sur les autres composantes de l’échiquier politique et surtout les partis représentés au Parlement, s’agissant des discussions en lien avec les problématiques et questions stratégiques du pays.