La Colombie du nouveau président Gustavo Petro a annoncé, mercredi, le rétablissement des relations diplomatiques avec la «RASD». «Le Gouvernement de la République de Colombie, inspiré par les principes et les buts de la Charte des Nations Unies, réaffirme la validité du Communiqué conjoint signé» avec le Polisario le 27 février du 1985, indique le ministère colombien des Affaires étrangères dans un communiqué.
La reprise des liens diplomatiques avec le Polisario intervient suite à une réception accordée, mercredi, par Gustavo Petro, au «ministre des Affaires étrangères» du Front, Mohamed Salem Ould Salek. Une rencontre à laquelle ont assisté la vice-ministre des Affaires multilatérales de la Colombie, Laura Gil, ainsi que le représentant du Polisario en Amérique Latine Mohamed Zrug.
El Gobierno de la República de Colombia, inspirado en los principios y propósitos de la Carta de las Naciones Unidas, reafirma la vigencia del Comunicado Conjunto suscrito con el Gobierno de la República Árabe Saharaui Democrática, el 27 de febrero de 1985 https://t.co/DnXTVO6TwE pic.twitter.com/B68Ioy7QD6
— Cancillería Colombia (@CancilleriaCol) August 10, 2022
La Colombie et le Polisario avaient établi des relations diplomatiques en 1985, sous le gouvernement de Belisario Betancur. Toutefois, l’arrivée au pouvoir d’Andrés Pastrana en août 1998 a permis au Maroc de décrocher un gel de la reconnaissance de la «RASD» en 2001. Le rétablissement des relations avec le Polisario constitue l’une des premières décisions prises par Gustavo Petro en matière internationale après son investiture, dimanche, en tant que premier président de gauche dans l’histoire du pays. Il est surtout le fruit d’une intense campagne de lobbying menée par l’Algérie.
Le Maroc en perte d’influence en Amérique latine
En effet, le voisin de l’Est a dépêché le président de son Assemblée populaire nationale (la Chambre des représentants), pour assister à l’investiture de Petro. Brahim Boughali a ainsi été reçu par le président du Sénat colombien, Roy Barreras, et le ministre des Affaires étrangères et de la Paix, le conservateur Alvaro Leyva Duran. A Bogota, l’Algérien a également eu des entretiens avec la nouvelle présidente du Parlement andin, la sénatrice colombienne Gloria Florez, connue pour ses prises de position en faveur du Polisario.
En mai dernier, le secrétaire général du ministère algérien des Affaires étrangères, Rachid Chakib Kaid, a effectué une visite à Bogota, conclue par la création d’un groupe parlementaire d’amitié algéro-colombien. Quelque jours plus tard, le mouvement séparatiste avait, lui aussi, courtisé le nouveau président colombien, en lui adressant un message de félicitation.
La nouvelle décision des autorités colombiennes intervient aussi après leur rétropédalage, en octobre 2021, sur l’extension de la juridiction consulaire de leur ambassade au Maroc pour inclure le Sahara. Après avoir fait l’annonce, considérée par plusieurs médias et observateurs comme une reconnaissance explicite de la souveraineté du royaume sur le Sahara, Bogota avait tenu à démentir cette analyse, dans une mise au point pointant des «interprétations erronées». Une tentative destinée à ménager le Polisario et Alger. D'ailleurs, le Front Polisario avait embrayé en mobilisant ses soutiens dans le pays, en mandatant l'Association colombienne d'amitié avec le peuple sahraoui (ACOLPS), pour condamner cette décision et appelé le gouvernement de Bogota à «réorienter sa politique extérieure concernant ce territoire non-autonome pour se conformer à la légalité et la justice internationale».
Plus largement, dans le contexte régional, plusieurs pays de l’Amérique latine ont rétabli leurs relations avec le Polisario, à commencer par le Pérou, qui avait pourtant suspendu ses liens avec la «RASD» en en 1996, sous l’initiative du Président Alberto Fujimori. Depuis, le Honduras et la Bolivie lui ont emboité le pas ces derniers mois.
Malgré l’adhésion du Maroc en tant que membre observateur au sein de la Communauté andine des Nations (CAN), en septembre dernier, le royaume n'a pas réussi à maintenir ses positions, dans une Amérique latine où les changements de chefs d’Etats ont très souvent des conséquences sur la question du Sahara.