Le rapporteur spécial de l’ONU sur la torture poursuit sa visite au Maroc. Sur son agenda figurait deux rencontres séparées avec les ministres de l’Intérieur et la Justice. Les accusations de tortures commises par des éléments de la police ou dans les prisons dont seraient victimes les détenus salafistes, étaient au cœur des entretiens entre Juan Mendez et, respectivement, Mohand Laenser et Mustapha Ramid. Il faut dire que le responsable onusien, lui-même un ancien détenu politique des années de la dictature en Argentine, durant ces multiples réunions avec les associations, a constitué un dossier complet sur la pratique de la torture au Maroc, fruit de ses multiples réunions avec les associations des droits de l’Homme.
Mendez et La grâce royale
Le quotidien Al Massae rapporte que Mendez a interpellé Mustapha Ramid sur le nombre des forces de l’ordre poursuivis en justice dans des affaires de tortures. Dans l’ensemble, ces cas demeurent très limités, même si le Maroc dispose, depuis 2006, d’une loi interdisant le recours à la torture et prévoyant des sanctions pénales. «Le nombre de poursuite judiciaires est très faible par rapport à celui des plaintes déposées par les ONG et les victimes de torture. Les rares dossiers dans lesquels sont impliqués des membres des forces de l’ordre n’arrivent pas à leurs termes à cause de la procédure des grâces royales ou dans le meilleur cas les mis en cause bénéficient de peines très réduites. L’impunité est toujours en vigueur», nous indique Abdehamid Amine, le vice-président de l’AMDH.
Justement, Juan Mendez a également interrogé le ministre de la Justice sur la procédure de la grâce royale. Cette question a été, déjà, soulevée en novembre 2011 par le Comité de l’ONU sur la torture qui s’était montré préoccupé «par certaines dispositions existantes du cadre juridique actuel relatif à la torture», au Maroc, «en particulier la possibilité d'amnistie et de grâce pour les auteurs de torture». Pour mémoire, ce comité avait demandé au royaume les crimes de torture «imprescriptibles».
Ramid dément l'existence de cas de disparitions forcées
Les disparitions forcées est l’autre sujet soulevé par Mendez lors de sa rencontre avec Mustapha Ramid. Fidèle à son discours, le ministre de la Justice les a complétement niées, estimant, comme le rapporte le quotidien Akhbar Al Yaoum, que depuis l’adoption de la nouvelle constitution du 1er juillet 2011, aucun cas de disparition forcé n’a été enregistré. Une version pourtant contredite par les rapports de certaines associations des droits de l’Homme. Cette année, des ONG ont fait part du cas d’un étudiant originaire de Fès, membre du MUR, la matrice du PJD, qui aurait été enlevé durant plus de trois jours avant qu’il ne soit localisé dans l’hôpital psychiatrique Arrazi de Salé.
L’OMDH au secours du gouvernement
L’organisation marocaine des droits de l’Homme, modérée par rapport à sa rivale l’AMDH, a une position très particulière sur la torture au Maroc. Mustapha Nechnache, le président de l’OMDH, a estimé dans un entretien accordé au Maroc Hebdo, que cette pratique au Maroc tend à disparaître, précisant qu’ «il y a seulement des cas qui nous arrivent de temps en temps». Et d’ajouter que «la détention abusive et les centres de détentions secrets font désormais partie du passé grâce à la mobilisation effective des ONG marocaines et grâce au soutien international».