Dans son rapport mondial de suivi sur l’éducation, l’UNESCO définit l’analphabétisme «comme l’incapacité pour une personne de lire et d’écrire, en le comprenant, un texte simple et bref traitant de faits en rapports avec sa vie quotidienne». La définition est claire, sans ambages ; et pourtant, il semblerait qu’au Maroc, le Haut Commissariat au Plan (HCP) et le ministère des Finances aient du mal à s’accorder sur une acception définitive du mot. En témoigne le décalage entre les chiffres présentés par les deux institutions : dans un bilan d’étape publié en 2009, le HCP faisait en effet état d’un taux d’analphabétisme se situant aux alentours de 40% (39,7%) dans le royaume tandis que le ministère des finances, dans sa Loi de finances 2012, situe le chiffre de l’analphabétisme pour 2010 aux alentours de 30%, soit un recul – impossible – de 10 points en un an. Impossible pourquoi ?
Tout simplement parce que comme l’indique la Vie Eco, dans son édition du vendredi : «l’observation de la série statistique sur la dernière décennie permet de constater que l’analphabétisme, en réalité, recule en moyenne d’un point par an et au maximum de deux points». Par conséquent, il est donc impossible qu’il soit passé de 39,7% en 2009 à 30% en 2010. Cette parenthèse refermée, l’hebdomadaire retient le chiffre du HCP – de 39,7% – comme celui officiel de l’analphabétisme au Maroc, ce qui situe la population analphabète du pays aux alentours de 10,2 millions d’individus en 2009.
L’alphabétisation progresse lentement mais sûrement
Sur ces 10,2 millions d’individus, la majorité vit évidemment dans le milieu rural, avec près de 55,6% de la population des campagnes marocaines ne sachant ni lire, ni écrire. Bien que ce chiffre soit élevé en valeur absolue, il faut rappeler que le taux d’analphabétisme dans les campagnes marocaines s’élevait à 75% en 1994, ce qui signifie que trois habitants de la campagne sur quatre étaient analphabètes il y a dix-huit ans.
Par âge, on devine facilement que la tranche la plus touchée est celle des 45 ans et plus, ces derniers représentant 46,4% du total des analphabètes de 10 ans et plus en 2009. Toutefois, malgré la prévalence du phénomène au sein de cette catégorie d’âge, tout porte à croire que la mise sur pied de programmes de lutte contre l’analphabétisme au début de la décennie va renverser la tendance à moyen-terme. Gageure d’espoir, le nombre de personnes suivant un programme d’alphabétisation est passé de 450 000 personnes en 2003-2004, à 700 000 personnes en 2007, ce qui correspond à une hausse considérable de 55%.
Objectifs Millénaires pour le Développement (OMD) : le temps presse !
Autre facteur de réjouissance : les jeunes âgés de 15 à 24 ans sont eux aussi de plus en plus alphabétisés. De fait, le taux d’analphabétisme au sein de cette cohorte a diminué de moitié entre 1994 (42%) et 2009 (20,4%). Du reste, il n’en demeure pas moins que l’objectif de généralisation de l’alphabétisation aux 15-24 ans à l’horizon 2015 est encore loin d’être atteint, ce qui explique d’ailleurs pourquoi un plan d’urgence a été lancé en 2008-2009 afin d’accélérer les efforts dans ce sens. S’il permet d’atteindre l’objectif fixé, à savoir 100% des jeunes de 24 ans et moins qui savent lire et écrire en 2015, du point de vue de l’ensemble de la population en revanche, il faudra encore attendre un peu, les prévisions du HCP projetant que seulement 80% de l’objectif devrait être réalisé pour la population marocaine toutes catégories confondues.
Pour rappel, le Maroc est signataire des OMD (Objectifs Millénaires pour le Développement, signé à New-York, en 2000) dont le deuxième objectif, consacré à l’éducation, «vise à ce que tous les enfants, garçons et filles, partout dans le monde, puissent bénéficier d'ici 2015 d'un cycle complet d’études primaires». Le temps presse/ 2012-2015, encore 20,4% de jeunes analphabètes: sortez les baguettes magiques !