Le Département d’Etat américain a publié, hier, son rapport annuel sur l’exercice des libertés religieuses dans le monde. Les services d’Hilary Clinton ont réservé tout un long passage sur le Maroc. Dans l’ensemble, le royaume s’en sort plutôt bien par rapport aux autres pays de la région MENA, soulignant les efforts du gouvernement à «encourager la tolérance, le respect et le dialogue» et que «les communautés non musulmanes étrangères pratiquent leur foi librement».
Le rapport note avec satisfaction que durant 2011, les «Juifs ont vécu en sécurité dans tout le pays». Les Marocains de confession juive au même titre que les musulmans sunnites malékites «bénéficient d’un «traitement préférentiel». Le document cite que «le gouvernement accorde chaque année des fonds pour l’enseignement de l’islam sur tout le territoire national et le judaïsme dans certaines écoles publiques. Les autorités financent, également, l’étude de la culture juive et de son patrimoine artistique, littéraire et scientifique dans certaines universités. A Rabat, l’hébreu et les religions comparées sont enseignées dans le département des études islamiques. Dans tout le pays, ils sont environ une douzaine de professeurs qui enseignent l'hébreu», constate le rapport.
Les autres minorités sous contrôle permanent
Cependant, le document révèle que «la loi autorise le prosélytisme mené par les musulmans sunnites malékites» et refuse que ces derniers soient l’objet d’actions ou de campagnes similaires visant à les convertir au rite chiite ou au christianisme. Justement le rapport note que «le gouvernement continue de restreindre la distribution des livres et de produits qui ne sont pas islamiques, notamment les bibles en arabe aux frontières. Une mesure qui frappe également tout produit qui n’est pas conforme au rite sunnite malékite auquel adhère la monarchie».
Le document souligne par ailleurs que plusieurs minorités religieuses pratiquent leur foi avec divers degrés de restriction officielle. «Le gouvernement surveille les activités religieuses de ces groupes et opère des mesures d’interdictions sur les individus et les organisations quand leurs actions dépassent les limités acceptées», lit-on dans le texte. Dans ce contexte de surveillance permanent des minorités, le document constate l’absence totale de mosquée dédiée exclusivement aux Marocains musulmans chiites.
Concernant les chrétiens, des témoignages déplorent que leurs activités soient soumises au contrôle. Une mesure qui s’est nettement renforcée notamment au lendemain des incidents de mars 2010, date à laquelle, le ministère de l’Intérieur avait ordonné l’expulsion d’une dizaine d’évangélistes, dont une majorité de ressortissants américains, qui dirigeaient un orphelinat à Ain Leuh (au Moyen-Atlas) accusés de prosélytisme.
Cette politique de contrôle permanent se traduit par la décision des autorités «d’exiger des groupes religieux d’être inscrits avant de pouvoir effectuer des transactions financières ou de créer des associations privées et des entités juridiques».
Al Adl wal Ihassane et les amazighs également
Le rapport du Département d’Etat sur les libertés religieuses a fait une escale en politique, soulignant que même les groupes, pourtant déclarés sunnites malékites, mais ne reconnaissant pas l’autorité spirituelle du roi sont victimes de restrictions de leurs activités, c’est le cas du mouvement de Al Adl wal Ihassane.
Le document évoque, également, les interdictions des prénoms amazighs sous prétexte qu’ils ne sont pas «musulmans».
Des «abus en Algérie»
A la lecture du rapport des services de Mme Clinton sur l’exercice des libertés religieuses dans le monde, les autorités marocaines peuvent exprimer leur satisfaction. Un sentiment que résume amplement une dépêche de la MAP sous le titre «Le Département d’Etat US met en exergue la tolérance religieuse au Maroc».
Concernant le voisin de l’Est, le document fait état d’ «abus en Algérie» et indique que «les groupes non musulmans ont longtemps rencontré des difficultés en essayant de s’inscrire auprès des autorités».
Le document souligne que certains convertis algériens au christianisme «gardent profil bas car ils craignent pour leur sécurité personnelle et redoutent de potentiels problèmes juridiques et sociaux», lit-on dans le texte. Dans ce climat délétère les Américains évoquent également des «menaces et le harcèlement des extrémistes» qui pèsent sur ces mêmes convertis.