Alors que l’on évoquait initialement comme raisons aux arrestations de Taoufik Ibrahimi, ancien PDG de la Comanav, ses deux ex collaborateurs ainsi que des syndicalistes UMT, les conditions dans lesquelles la Comanav, ancien établissement public, était passée aux mains de la famille Abdelmoula, le parquet précise les différents chefs d’accusations. Les mis en cause sont poursuivis pour : «construction d’une bande criminelle, en vue de saboter des structures, des ports et des bateaux, atteinte à la sécurité de l’Etat, divulgation de secrets professionnels et entrave à la liberté de travail», a indiqué, dans un communiqué, paru en début de semaine, le procureur de la Cour d’appel de Rabat.
Le procureur «a reçu des informations selon lesquelles des individus ont perpétré des actes illégaux de nature à porter atteinte à la sécurité intérieure de l’État et aux intérêts économiques nationaux, à endommager des structures, des ports et des bateaux et à entraver la liberté du travail au port Tanger-Med, une artère économique vitale du Royaume qui fait face à une concurrence farouche de ports étrangers voisins», note le communiqué dont un l’extrait est rapporté par Le Matin.
Atteinte à l'activité du port de Tanger-Med
Des conflits sociaux secouent le port tangérois depuis plusieurs mois et, selon le procureur, Taoufik Ibrahimi et les autres personnes inculpées «auraient profité» de cette situation «pour porter atteinte à l’activité du port». Au cours du mois de mai, les choses se sont envenimées à un tel point que des employés du port ont immobilisé deux navires à l’aide de grues, dont certains à bord ont recouru à la force et à la menace. Même l’italien GNV, qui remplace actuellement la Comanav-Comarit sur les liaisons du Maroc avec la France, a vu ses bateaux bloqués lors de ces mouvements de protestation.
«Nous n’avons rien à voir avec ces accusations concernant le sabotage de l’économie ou l’atteinte à la sécurité de l’Etat», déclare, à l’Economiste, Brahim Karfa, secrétaire national de l’UMT. «Pour ce qui est des grèves survenues au port de TangerMed, elles avaient pour objectif de défendre les intérêts des travailleurs. D’ailleurs, nous avions fini par trouver des accords», ajoute la source syndicale ajoutant que «l’UMT avait proposé de mettre en place une convention avec la wilaya et les opérateurs de TangerMed pour garantir la paix sociale.»
La peine de mort ?
Mardi 19 juin, Taoufik Ibrahimi, ses collaborateurs de l’époque ainsi que les syndicalistes UMT Said El Heirech et Mohamed Chamchati ont comparu devant le tribunal de Casablanca et celui de Rabat-Salé. Si jamais les chefs d’accusation sont avérés, ils risquent des peines lourdes, comme le souligne à l’Economiste un avocat au barreau de Casablanca.
A titre d’exemple, l’atteinte à la sécurité de l’Etat est passible de la peine de mort selon les articles 201, 202 et 203 du code pénal, tandis que l’article 241 prévoit une peine de 5 à 20 ans d'emprisonnement assortie d’une amende de 5 000 à 100 000 DH. La constitution d'une bande criminelle pourrait être associée aux articles 293 et 294. Ces derniers prévoient 5 à 10 ans de réclusion. Pour l’heure, les mis en cause sont en détention provisoire à la prison locale de Salé.