Fin avril dernier, le directeur adjoint chargé du pôle Dette à la direction du Trésor, M. El Hassan Eddez annonçait lors d’un entretien à Abou Dhabi que le Maroc envisage émission obligataire internationale libellée en dollars, d’un montant maximum d’1 milliard de dollars pour le mois de septembre ou octobre prochain. Une information que le ministère des Finances n’a pas confirmée depuis. Monsieur le directeur aurait trop vite parlé ? Interviewé par Reuters, le ministre délégué en charge du Budget, Idriss Azami Al-Idrissi, a émis des réserves sur la question tout en laissant comprendre que le gouvernement serait en train de cogiter sur une éventuelle sortie. Seulement, tient-il à préciser, «nous n'avons pas pris de décision définitive au sujet d'une émission obligataire souveraine. Nous n'avons même pas mandaté une banque ou conseillers financiers pour toute émission d'obligations».
Le ministre considère que les propos de M. Eddez ont été sortis de leur contexte, mais ne les infirme pas pour autant. Si jamais cet emprunt est réalisé, il sera le premier pour le Maroc, puisque jusqu’ici, le royaume n’a émis qu’un emprunt obligataire en euros.
En ce moment, l’économie du pays va mal, telle une asphyxie. Le secteur agricole considérablement en baisse due à la sécheresse et à la crise européenne, sachant que l’UE est un marché privilégié pour le Maroc. La pression est de plus en plus forte avec une augmentation des importations et des difficultés à maintenir des entrées de devises suffisantes via l’export, le tourisme et les transferts des MRE. Depuis le début de cette année, le Maroc déploie toute une stratégie pour développer ses partenariats économiques avec l’extérieur pour relever son secteur de l’export. En matière de tourisme le royaume table sur la conquête de nouveaux marchés. Mais toutes ces démarches ne pourront pas être rentabilisées sur le court terme. Pourtant, le besoin financier est pressant. Pour renflouer la caisse de compensation afin d’atténuer le déficit budgétaire, le gouvernement multiplient les actions. Après la réforme du système des subventions, il est passé la semaine dernière à l’augmentation des prix du carburant.
Pas lieu de désespérer
Les économistes du Crédit agricole affichent cependant un certain optimisme. Pour eux, la situation est critique mais pas «désespérée», car Bank Al Maghrib est à même de venir en aide à l’Etat. «La Banque centrale a les moyens de garantir l'arrimage de son taux de change à l'euro/USD, même si on prévoit que les réserves de changes ne pèseront plus que près de quatre mois d'importations fin 2012 contre cinq aujourd'hui», explique les économistes à Boursorama.
Le roi devrait mettre la main à la poche
Dans un contexte social comme celui actuel, les économistes jugent qu’en cas de non-retour à la normal au bout d’une certaine période, le gouvernement devrait procéder à une réduction sérieuse des dépenses. Si la situation perdure, l’impact sur le risque politique pourrait être important. Car la «hausse de la pauvreté et du chômage» pourrait soulever une nouvelle fois les cercles de manifestants. D’ailleurs ces mêmes questions soulevaient la semaine dernière près de 50 000 personnes qui ont manifesté contre le gouvernement Benkirane.
Avant que les choses ne s’aggravent et que les manifestants n’abordent la question de la fortune personnelle du roi Mohammed VI, ce dernier devrait «soutenir le gouvernement actuel», estiment les économistes.