Saïda Menebhi, Poème du 20 octobre 1976 (Prison civile de Casablanca)
Le vent de mon pays souffle, hurle, gronde sur la terre humide qu’il balaie il trace des figures il grave un passé le mien, le tien, celui de chacun son bruit me rappelle une symphonie celle que tu sussurais à mon oreille chaque nuit Avant, il y a longtemps déjà aujourd’hui, ce soir, cette nuit seules les empreintes de la vie me reviennent à l’esprit et la pluie tenace, le vent têtu reviennet comme chaque année et me ramènent à toi aussi loin que tu sais me rappellent encore que j’ai un corps que j’ai une voix que j’élève en offrande à toi.
Seule avec l’exode Naïade dans le crachin De l’âme J’apprends de lui une science Que j’ignore sa structure…son contenu Ni d’où il vient Ni où il m’exécute Tout ce que je sais c’est que pour lui Je trimarde … je me métamorphose Je tombe Je me perde J’apprends comment j’imprègne le profond Et je n’y arrive pas J’apprends comment je serai pour les choses Une langue et une chimère Dans l’Isthme J’intrique une commission pour mes jours J’ai invité des fieux / amitiés que j’ai été enceinte -je n’ai pas oublié la rose- Mais elle est venue avec canines…. castrasse Et sans les bras De son amertume ce qui chipote l’âge La blancheur a parlé ! Le temps est le vide ni avant ni après Moi, je le ressemble J’ai oublié hier Et je n appartiens pas au présent Légère libre Même du rêve Cet exode m’a apprivoisé – je ne l’apprivoise pas Toi seul la grande vérité Ô la douleur …. La violette se rallume Mais, a-t-il resté un seul orbe Qui parle la langue de la violette ?! Ô celui qui je l’ai cru mon ami Par le moins de la mort de toi Je n’ai pas pris mon réticente Ô le sylphide des alphabets Et l’hyaloïde des voluptés Ô le saillant de ma féminité Ô.. la friabilité Aujourd’hui est le commencement de ma résurrection La pluie du matin est un enchantement irrésistible La couleur de mon sang est verte Le ciel en dessous de moi n’est aucune forme Je commence Je dis au astre de mes cieux : Pas de modalités pour toi sauf l’étincellement Je disperse Rallié moi ô rayon Je t’ai choisi Le tissu du temps déchiré L’amour le coudre Je te promis ô toi qui vient Je ne te viendrai que du côté de la lumière Mon sphygmique restera ton printemps Ô toi corps Mes lèvres sont un épiage Et le dernier de mes poèmes est de blé et violette Ainsi je précède l’avenir Je ne créance sauf mes pas A toi mon tracas ô mon doute Mes sens sont témoins contre moi Je suis la vérité des autres Et eux … ma métaphore Ainsi, encore, Je démoralise la démoralisation des amis J’épelle ses formes piquantes Je modèle une histoire de transit Mon bateau est une agacerie Et des questions La gloire à toi ô mon âme chuchoteuse : Soit ta force Lorsque les autres seront ta faiblesse De son hauteur et sa clarté Le soleil est filandreux Et …seul ! Rabat le : 31decembre 1995. Recueil de poèmes : « Dissension des lointains »
- Wafa El Amrani : Poétesse marocaine arabophone, célèbre par ses poèmes qui contiennent un souffle soufique universe. traduction de noureddine mhkkak.
Devant ta boutique, moi, la voleuse de bonbons aux doigts devenus collants, je n'ai pas réussi à en mettre un seul dans ma bouche.
* * Quelle sottise ! Dès qu’on frappe à mon cœur il s'ouvre.
* * Le désir m'embrase et mes yeux scintillent. Je range la morale dans le premier tiroir venu, me change en démon, bandant les yeux de mes anges pour un baiser.
* * Je suis apeurée comme une gazelle devant les yeux de ta faim, aime-moi en silence et laisse-moi m’interroger.
* * J'attends, et qu'est-ce que j'attends ? Un homme chargé de fleurs, et de mots doux. Un homme qui me regarde et me voie. Qui me parle et m'écoute. Un homme qui pleure pour moi, alors j'ai pitié de lui et je l'aime.
* * J'ai vu des traces de pas points noirs qui vont et viennent. La neige blanche dont on dit qu’elle est pure, a trahi les oiseaux, les chats et les fantômes de mes pensées, avant que le soleil paresseux ne se lève, pour effacer tout cela.
* * On frappe à la porte. Qui est-ce ? Je cache la poussière de ma solitude sous le tapis, j'arrange mon sourire, et j'ouvre.
* * Un étranger me regarde, un étranger me parle, je souris à un étranger, je parle à un étranger, un étranger m'écoute, devant ses peines propres et blanches je pleure, sur la solitude qui unit les étrangers.
* * Ils pénètrent nos vies comme des ruisseaux, de sorte qu’ils nous submergent, et nous ne savons plus qui nous a donné l'eau et le sel, et qui a déposé en nous cette amertume.
* *
Une femme aux yeux tristes à la peau fine. Une femme aux pas lourds à la lente respiration, rêve d'un homme qui rende la sève à son rêve.