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il y'a dix ans, le père d'agoun'chiche mourrait a Rabat
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7 décembre 2005 15:51
Le 18 novembre 1995, l'écrivain Mohammed Khaïr-Eddine mourait d'une maladie contre laquelle il a lutté de toute son énergie, allant jusqu'à perdre l'usage de la parole mais faisant entendre sa voix malgré tout, comme en témoigne son journal : « On ne met pas en cage un oiseau pareil » (Dernier journal, août 1995) .
Si on a beaucoup dit que la production littéraire de Khaïr-Eddine est marquée par les thèmes de l'errance et de l'exil ainsi que ceux de la révolte et de la subversion, il reste toutefois à aller plus loin dans cette oeuvre ouverte sur tant de possibles dans le domaine de la lecture et de la recherche.
L’anarchiste qu’il était, le bon vivant qu’il essayait d’incarner et l’écrivain rebelle contre tout ordre établi y compris les règles de la langue française, qu’il maîtrisait par dessus bord, n’a pas eu l’aval des détenteurs du ‘“pouvoir d’écrire en rond.”
Malheureusement, ou heureusement c’est selon, ce sont les Français qui en ont découvert les les grandes qualités de l’écrivain, origianire de la régioin de Tafraout, donc imprégné jusqu’aux bouts des ongles de la culture amazighe. Jean Paul Sartre, la référence de la littérature française, des décennies durant, a toujours apprécié les écrits de feu Khaireddine, qu’il considérait comme l’un des meilleurs écrivains de langue française au monde.
Et ce n’est pas Olivier Monjin, philosophe et responsable de la célèbre revue Esprit qui dira le contraire. Loin de là. Invité à un hommage organisé vendredi 26 janvier 2001 à l’institut français de Rabat, il a peint le portrait de son ami et auteur préféré qu’était l’auteur d’Agounchiche. Il appellera au passage les amis de Khaireddine, Marocains et Français, à rassembler et rééditer les livres de Khaireddine.
Son imprimeur et compagnon pendant trente ans, Jean-Paul Michel, lui a parlé de la vie que menait l’écrivain. Dépensier certes, buveur et grand bosseur à la fois, ses livres, dira M. Michel, sont étonnants en ce sens qu’à chaque relecture de l’un de ses textes, on découvre du nouveau, une idée passée inaperçue à la lecture précédente...
L’hommage qui s’est prolongé jusque tard dans la nuit de vendredi à samedi aura au moins permis de relever que la création originale restera vivante pour toujours.

Si Khaïr-Eddine fait, avec un réalisme minutieux, la description des symptômes, des soins, de la douleur, de l’imminence de la mort, c’est avec l’ironie du désespoir. Victimes d’erreurs médicales à répétition, Khaïr-Eddine a la dent dure contre les blouses blanches. Vendredi 11 août, 12h45 : « Si tous les malades devaient se venger, il n’y aurait plus de toubibs. » Dimanche 13, 15h15 : « Prendre un de ces médecins, lui trancher la gorge sans frémir, le tailler en lanières et disperser sa barbaque aux corbeaux ! » Au passage, les universitaires vautours en prennent aussi pour leur grade. « Les profs d’université vous font manger du sable à la place du couscous. » (mardi 8).

extrait de mohammed khair-eddine: le sang

""je m'esquive et ce n'est pas par inadvertance que le sang m'extradie je vais aux tumultes des villes sans vrai nom et partout je piétine des nuages d'atomes sur toutes les lignes téléphoniques se posent des astres malintentionnés et des trombes (...) je t'ai construit à ma décence selon l'adresse des pièges sans rien omettre de la magie du vaudou détrôné par l'européen aux dents si affûtées aux mains si longues à la science de saurien souriant le père des pères du vieux poisson fabriqué par la vieille tarentule sacrée devant le père des pères et la mère des pères je ne t'ai pas fait à la mesure de Dieu pas érigé à la hauteur du globe je t'ai donné ma voix nous sommes quittes dis-tu et j'objecte je me réclame d'une civilisation de mangoustes et de cérastes anarchiques je ne connais pas l'Asie ouï-dire et les gros livres les phrases les rimes les coups d'états les soulèvements du coeur (...) le sang et la sardine noire du sang j'ai assisté à des saignées pratiquées par la nuque et le pubis c'était sur un trône de schiste et sur le vide mitoyen du délire la vieille fille aigrie par les travaux des champs et par tous les puits qu'elle avait creusés enfonçait jusqu'à la tête dans la pierre et riait à demi-somnolente tandis que au-dessus d'elle et à même elle la doctoresse dessinait le déluge la fumée la neige la guerre la mort était présente.

récapitulatif des oeuvres de m. khair-eddine

Agadir, 1967
Soleil Arachide, 1969
Moi, l'aigre, 1970
Le Déterreur, 1973
Ce Maroc ! 1975
Une Odeur de Mantèque, 1967
Une vie, un rêve, un peuple, toujours errants, 1978
Légende et vie d'Agoun'chich, 1984
 
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