Le poète avait une muse autrefois. Une fleur de rosée tombée du ciel, une âme pure et douce au cœur mélancolique. Le poète aimait sa muse comme on aime une étoile, d'un amour si pur qu'il l'élevait au-dessus du monde. Et la plume, ivre de lumière, glissait sur le papier, et les mots s'écrivaient, s'écriaient, décrivaient la beauté transcendante que l'œil, comme le cœur du poète, percevaient. Cette lumière qui irradiait, enveloppait tout alentour, dès que sur elle il posait son regard. L'inspiration ne le quittait plus, chaque jour offrait à sa bien aimée une ode nouvelle. Puis la muse s'en alla. Sans mot dire. Elle emporta avec elle sa lumière, sa beauté, et tous les mots. Elle ne laissa au poète que l'Amour. Un amour trop grand pour lui, qui déchirait son cœur. Le poète pleura des jours et des nuits, des nuits et des jours. La plume, interdite, s'était drapée de silence. Le temps passa, les semaines, puis les mois. Un vide vertigineux s'était installé en lui, le tirant vers le fond. Jusqu'au jour où la plume s'invita au plein cœur de la douleur. D'abord elle fut prise d'effroi, puis elle accepta. Alors, un à un, elle recueilli tous les maux et les déposa délicatement sur la page immaculée. Le poète à nouveau écrivait. La souffrance se déversait à l'encre de sa plume. Et jour après jour, c'est une ode en écho qui vint au monde, une ode à cet Amour qui l'habitait. La plus belle de ses œuvres naquit alors, dans l'absence. Et le vide fit place à la lumière.
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