A l’appel de l’Association Tafra pour la solidarité et la fidélité et la Coalition démocratique pour la libération des détenus politiques et la levée du blocus du Hirak, un rassemblement a eu lieu ce mercredi martin devant le Conseil national des droits de l’Homme (CNDH). D’autres organisations associatives et syndicales ont également marqué leur présence, à l’image de la Fédération nationale de l’enseignement (FNE) et l’Association marocaine des droits humains (AMDH).
Cette manifestation survient un mois après une précédente, qui a eu lieu devant les locaux de la Délégation générale à l’administration pénitentiaire et à la réinsertion (DGAPR) pour protester contre les conditions de détention des militants du Hirak du Rif, transférés vers différentes prisons du nord et du centre du pays.
Lutter contre les décideurs «séparatistes»
Au cours de ce plus récent rassemblement, le président de l’Association Tafra, Ahmed Zefzafi, a pris la parole en s’adressant directement «au CNDH et à sa présidente» : «Nos enfants sont actuellement en prison à cause de sa rétention du rapport médical [confirmant les allégations de torture, ndlr].»
Ainsi, le père de Nasser Zefzafi, figure de proue du Hirak du Rif condamné à 30 ans de réclusion, tient Amina Bouayach responsable. Il estime qu'elle «attend des instructions tout comme c’est le cas pour Tamek [à la tête de la DGAPR, ndlr]». Par ailleurs, il pointe du doigt le mépris de ceux qui occupent les postes de décision par ces mots : «Nous combattons de manière pacifique ces séparatistes qui sont à ces postes et qui ont voulu assiéger le Rif en l’isolant de cette patrie.»
Cette déclaration sonne comme l’écho direct au communiqué de la DGAPR, publié début novembre, dans lequel l’institution accuse des associations et des proches des détenus, notamment Ahmed Zefzafi, de tentatives d’«induire en erreur l’opinion publique en déformant la réalité», ou même de faire de la situation de son fils «un fonds de commerce». Et Zefzafi de clamer lors de ce sit-in : «Nous luttons seulement pour défendre notre appartenance à notre patrie et pour que notre identité ne soit pas anéantie.»
Enfonçant le clou, cette fois-ci lors des discussions sur le budget de la délégation à la Chambre des conseillers, Mohamed Tamek a accusé ouvertement l’AMDH de «servir des agendas étrangers» (sic). Ce à quoi le président de l’Association marocaine des droits humains (AMDH), Aziz Rhali, a récemment rétorqué : «[Mohamed Tamek] doit se remettre au travail et gérer son département comme il se doit, au lieu de nous traquer et traquer chaque article écrit à son encontre.»
Des détenus du Hirak déplacés une nouvelle fois
«Hier, nos enfants ont refusé de recevoir leurs avocats et veulent mourir en martyr», a déploré Ahmed Zefzafi, sachant qu’ils se sont aussi abstenus de recevoir une précédente visite de leurs proches.
«Libérez-les, ils n’ont rien fait. Je défie l’Etat de prouver une seule accusation parmi celles qui leur sont reprochées», a clamé le père de Nasser Zefzafi, ajoutant que «nos enfants meurent actuellement dans les prison, en particulier ceux de Ras El Ma» où ce détenu purge sa peine.
En avril dernier, plusieurs associations ont contesté le transfert des détenus du Hirak du Rif emprisonnés jusque-là à Casablanca, ainsi que leur répartition en petits groupes sur différentes prisons des régions du nord et du centre du pays. Cette fois-ci, la Délégation générale à l’administration pénitentiaire et à la réinsertion (DGAPR) a annoncé un nouveau transfert.
Cette nouvelle opération concerne désormais Mohamed Haki, Samir Ighid, Wassim El Boustati et Zakaria Adehchour. Les quatre jeunes seront ainsi séparés de Nasser Zefzafi et de Mohamed Jelloul, qui restent dans l’établissement pénitentiaire près de Fès, tandis que leurs codétenus seront transférés à la prison centrale de Guercif.
L’initiative est perçue par les soutiens des détenus comme une nouvelle mesure punitive, après la fuite d’un enregistrement sonore de la figure de proue du Hirak du Rif et le limogeage du directeur de la prison de Ras El Ma. Mais de son côté, un communiqué de la DGAP indique que cette démarche «s’inscrit dans le cadre du rapprochement des prisonniers de leurs familles en vue de préserver leurs liens familiaux et sociaux».
Selon la même source, «les détenus concernés avaient présenté, en date du 25 novembre, un avis faisant état de la fin de la grève de la faim qu’ils avaient entamée le 19 du même mois». A plusieurs reprises, les sorties de la DGAPR et les déclarations des proches des détenus se sont contredites sur l’observation ou la suspension de grèves de la faim par ces militants, notamment concernant celles, répétées, de Rabii Al Ablak.