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Grand Angle  

France : Les glissements islamophobes dans les médias ont la peau dure

Après la transmission en direct de la Convention de la droite et l’intervention d'Eric Zemmour lors de cette rencontre, LCI en remet une couche. Cette fois-ci, la saillie vient de la part d’un journaliste, qui compare le voile à un uniforme SS, dans le cadre de la polémique sur l’agression verbale d’un responsable RN contre une mère voilée.

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Photo d'illustration / Ph. DR.
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Mercredi matin, le journaliste Olivier Galzi s’est aligné sur le ton d’Eric Zemmour en paraphrasant le polémiste, lors d’un débat dans le cadre l’émission «9h Galzi» de LCI. Alors que la chaîne a transmis en direct le déroulement de la Convention de la droite le 28 septembre dernier, notamment le discours résolument islamophobe de Zemmour où il compare la djellaba et le voile à «un uniforme de l’occupation», le présentateur a fait un parallélisme entre le voile et «un uniforme SS».

«Ce n’est pas un signe religieux qu’on veut interdire ou étendre l’interdiction d’un signe religieux, c’est un signal politique, comme on interdit un uniforme SS», a littéralement lancé Olivier Galzi, au cours de ce débat portant sur l’interdiction du voile après l’annulation d’une sortie scolaire. Si de cours extraits trahissent un malaise sur le plateau, le replay de l’émission, lui, a été retiré du site de la chaîne.

«Comparer les uniformes SS au voile, on atteint un point Godwin quand même», a tenté le coprésident de la Fédération des conseils de parents d’élèves (FCPE), Rodrigo Arenas en répondant dans l’immédiat à Olivier Galzi, sans que l’échange ne suscite plus de réactions instantanées. Cependant, plusieurs utilisateurs ont émis leurs plaintes auprès du CSA à propos de cet extrait, selon Les Inrocks.

LCI va-t-elle se démarquer de l’islamophobie banalisée dans ses émissions ?

Ce débat intervient après la polémique provoquée par le président du groupe RN en Bourogne-Franche-Comté, Julien Odoul, qui a pris à partie une mère voilée accompagnant un groupe d’écoliers, en la sommant de retirer son «voile islamique» ou de sortir de l’assemblée régionale. Là également, LCI n’enterre pas la controverse et a invité le responsable lui-même, mardi, sur le plateau de l’émission «Le Grand Soir», au lendemain de propos tenus au cours de ce programme par Yves Thréard, directeur adjoint du Figaro, qui a affirmé «déteste[r] la religion musulmane» (sic).

Pendant près de vingt minutes, Julien Odoul a réclamé que les femmes «retirent leur voile» dans les administrations, institutions et départements publics, quitte à sortir du cadre de la loi sur la laïcité. Ce cadre lui a d’ailleurs été rappelé par les invitées du plateau, notamment Nathalie Arthaud, porte-parole du parti Lutte ouvrière et la militante féministe Fatima Ezzahra Benomar, co-fondatrice de l’association Les Effronté-e-s.

Dans la succession de ces glissements, la directrice de LCI, Valérie Nataf, a tenté de rappeler à l’ordre les équipes des différentes émissions quant à la maîtrise de l’antenne, sans pour autant pointer du doigt la charge islamophobe de leurs «dérapages». Réagissant pour sa part à ces glissements, le Conseil français du culte musulman (CFCM) a exigé, mercredi, que les autorités fassent respecter «instamment» les règles de droit.

Président par intérim de cette institution, Dalil Boubakeur s’est dit en effet «consterné» de voir la rhétorique d’extrême droite «outrageusement banalisée», notamment via les «récents déferlements» qui stigmatisent les musulmans et surtout le port du voile. Cité par l’AFP, le responsable religieux a également fustigé des «réactions hystériques» qui renforcent un «climat anxiogène», faussement «sous couvert du respect de la laïcité et de lutte contre la radicalisation et le terrorisme».

La veille, le Premier ministre, Edouard Philippe, avait déclaré devant l’Assemblée nationale ne pas souhaiter légiférer au sujet des accompagnatrices scolaires, contrairement aux recommandations tenues par le ministre de l’Education nationale, Jean-Miche Blanquer.

En réponse à la succession des polémiques, l’islamologue Rachid Benzine a, pour sa part, choisi de s’adresser à l’enfant de l’accompagnatrice voilée prise à partie par Julien Odoul. «Ne garde pas seulement dans ta mémoire le souvenir de cet élu qui a tiré sa triste gloire de l’humiliation de ta maman : pense surtout à celles et ceux qui se sont opposés à lui, car ce sont eux qui incarnent cette République dont tu étais venu apprendre les rouages, une République qui fait place à chacun», a souligné l’écrivain dans une lettre ouverte publiée ce jeudi sur le HuffPost.

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